L’édition hivernale du festival Astropolis se tenait du 20 au 26 février à Brest. L’équipe Electrocorp est allé mener son enquête. Au programme : une semaine d’activités entre conférences, projections, fiestas d’après-midi, marché aux vinyles… et bien entendu, deux soirées qui affichaient des pointures de la House et de la Techno.

Notre arrivée en gare de Brest programmée pour vendredi après-midi nous empêche d’assister à une prestation qui semblait plus qu’alléchante. Chloé et Vassilena Serafimova, dans une formation hybride, rendant hommage à Steve Reich, poursuite de l’aventure Variations. Mais qu’importe, nous sommes remontés à bloc pour entreprendre les festivités comme elles se doivent. La météo, idyllique et généreuse sera de notre côté tout le weekend. Cet aspect peut sembler anodin pour certains, mais nos amis bretons nous le feront remarquer à plusieurs reprises. Ce weekend est à marquer d’une pierre blanche. On ne vous le fait pas si bien dire. Le plaisir de participer à Astropolis Hiver comprend aussi les joies de festoyer dans une ville à taille humaine avec une salle de concert située à deux pas du port et à quelques dizaines de minutes du centre-ville. Ces avantages nous permettent de passer un début de soirée sans pression ni sans ce fameux dernier métro ou cette navette à ne pas louper. On sent indéniablement une excitation particulière s’immiscer, que ce soit dans nos connaissances ou chez les astropoliens rencontrés au détour d’une rue. La fête se prépare.

Vendredi Techno & Electro
La soirée du vendredi compte quelques figures incontournables de la Techno : DJ Stingray, Charlotte de Witte, Legowelt et Broken English Club. Une programmation alléchante donc, qui mêle ovnis musicaux et nouvelles têtes aux cotés de loubards avisés.
La Carène, principale salle de concert de Brest, sera le théâtre d’un weekend d’aventures nocturnes. Un complexe impressionnant dans lequel se partagent une petite et une grande salle départagées par un hall, en guise de bar ou coin de repos, au choix. Le main stage est décoré à la sauce Astropolis, entre des constructions en métal rappelant l’aspect industriel étroitement lié à la ville (et donc infiné à Astro) et trois boules à facettes imbriquées dans des constructions qui éclairent la salle de nombreux faisceaux de lumières blanches perçantes.

Minuit, la salle principale est emplie d’une couleur rouge ténébreuse, qui semble se dégager du DJ booth pour se disperser progressivement dans la foule. Nous apercevons à peine DJ Stingray, tout de noir vêtu encerclé par cette lumière rouge, sombre et puissante, délivrant une ambiance mystique à l’aspect cérémonial. La scénographie, particulièrement remarquable donc, s’ajoute au plaisir d’une salle bien pensée, assez vaste pour pouvoir libérer nos mouvements et nos esprits.
DJ Stingray se cantonnera à son style de prédilection, la Techno et l’Electro. Une Techno mélodique mais peut être un poil trop « classique » à notre goût, ponctuée de quelques notes d’acid par ci… et même un peu de Dub par là. Puis Stingray laisse sa place à Legowelt devant une salle quasi-pleine, prête à en découdre.
Legowelt se lance dans une musique plus lente mais plus riche. Un live absorbant provocant une véritable secousse. L’ambiance est à la fête et la salle de la Carène, désormais pleine, se secoue au rythme des missiles de Legowelt. Certains corps se dénudent, hommes comme femmes, la foule est survoltée. Legolwet pourra se targuer d’avoir, à nos yeux, dévergonder la soirée avec un live de qualité. C’est manifestement LA performance à retenir de cette première soirée. Néanmoins, on s’étonne tout de même d’un volume sonore pas forcément très généreux.
Une très belle découverte se fera dans le hall, à la manière d’un concert improvisé, que l’on apercevra lors d’un passage au bar. Le duo de batteurs Deux Boules Vanille s’acharne sur ses instruments et propose un live terriblement accrocheur. Une sensation de live que l’on chéri tant, notamment grâce à la proximité entre le public et le groupe, et qui vient donc complémenter les DJ sets programmés. Les voilà donc, en train de faire se dandiner une centaine de personnes dans le hall de la Carène, entre le bar et la plante verte de déco, mariant une intensité de percussions avec des explorations sur leurs instruments électroniques pour électrifier ce live. On ne comprend pas vraiment comme cela marche, entre machine de bidouilleur et jeu de batterie arracheur… mais c’est indéniablement la claque du weekend !
Un festival a toujours son lot de bonnes surprises et Astro n’a pas manqué à la règle : celle-ci se nomme Deux Boules Vanille.
Voilà l’avantage d’une programmation éclectique contrairement à certains festivals qui ne cessent d’empiler les têtes d’affiches, sur des line-ups longs comme un bras. La force d’un festival et l’expérience qui en ressort se base sur des détails de la sorte, en réussissant un grand écart entre la construction d’une programmation mariant des têtes d’affiches et de nombreuses surprises pour attiser la curiosité des spectateurs.
Coté scène principale, Charlotte de Wite suivra Legowelt pour un set assez court, moins intense que nos attentes. La belge nous avait pourtant réellement impressionné lors de son passage en terre bordelaise en septembre. La magie n’opérera pas cette fois-ci, peut-être dû à cette sensation de manque de volume.

La seconde bonne surprise de la soirée nous attend. Nos connaissances bretonnes nous informent de l’existence un collectif organisateurs d’afters de qualité sur le port : La Singerie. Cependant, suite à des problèmes de logistique et d’autorisation, le crew a dû stopper ces festivités du petit matin.
Voici une mise en bouche des activités de ces travailleurs de l’aube.
Aux vues des retours des locaux, la déception de louper ces moments d’aurore féeriques, est lourde. C’est sans compter sur d’irréductibles bretons, qui reprennent les commandes à leur sauce. Voilà ce que nous étions venu chercher, une motivation à toute épreuve et de l’énergie sauvage. Une centaine de festivaliers entreprennent donc la poursuite de la soirée, sur le parking en face de la Carène. Une voiture, des enceintes sur le toit et de la ferveur. Malgré un manque de technique flagrant dans les transitions et un ingénieur du son dépassé, cette initiative durera jusqu’au petit matin. Une ambiance délicieusement fauve se dégage de cette soirée et nous y prenons goût. Nous rentrons donc lessivés mais émerveillés par ce public assurément réceptif.
Samedi chinerie, House-Music & Disco
Le samedi est ponctué par des événements diurnes comprenant des shows aux Capucins et un vinyl maket à la Passerelle accompagné de sets de collectifs locaux. Une fois de plus, l’osmose générale se veut conviviale et le temps défile… Nous retrouverons le fameux collectif La singerie sur place pour animer cette fin d’après-midi. Au bout de quelques heures, le vinyl market est délaissé pour la piste de danse. Celle-ci voit ses rangs grandir et la Singerie nous régale entre Disco, House, Techno, Tech-House… bref : un peu de tout. Le bar annonce sa rupture, il est 19h, pas de doute, on est au bon endroit.



A peine le temps de souffler, qu’il est temps de faire les provisions. Astropoliche me disent certains. Comprendra qui voudra.
Nous retournons donc à la Carène pour cette deuxième et ultime soirée. Les mélodies tribales et percutantes de la fin du set d’O’Flynn nous accueillent. Malheureusement, notre arrivée tardive nous empêchera d’assister au début de sa performance. Le passage de flambeau s’opère et Hunee prend les commandes de cette salle aux allures d’église. Comme à son habitude, le représentant de l’écurie Rush Hour s’occupe de désinhiber la foule avec un méli-mélo de tout ce qu’il aime digger : musique exotique, House et Disco. Un set rythmé et maîtrisé de bout en bout. Malgré notre expertise en ce qui concerne les sets de Hunee ainsi que des connaissances assez pointues sur son terrain de prédilection musicale, on ne reconnaîtra encore une fois aucun morceau. Un set qui s’inscrira comme magique et qui restera pour nous le peaktime de la soirée. L’ambiance nous surprend une fois de plus, le public ne cesse de s’agiter et la magie opère. Certains ont sorti le déguisement, on apercevra une jolie princesse au fort taux de testostérone notamment.

Un petit détour par la seconde salle nous permet d’apercevoir Romain Play aka Mr Camion Bazar qui, pour des questions de logistique, a troqué son camion contre un DJ booth traditionnel. Il n’empêche qu’une déco aux couleurs du Camion Bazar prendra corps et âme dans cette salle, entre flamand rose gonflable, couleurs pailletées, ballons gonflables… i tutti quanti.
Vers 2h, la tête d’affiche débarque et prend le relais. Kerri Chandler se voit alors en position délicate. Passer derrière Hunee n’est pas chose facile et particulièrement à ce moment là. L’expérience du monsieur fera amplement l’affaire, distillant une House colorée et mélodieuse comme on l’aime. Malgré des crampes aux jambes, le set de Kerri nous incite à puiser dans nos réserves. Un set qui oscillera principalement entre Disco et House, où l’on reconnaîtra certains classiques du genre.
Kerri terminera son set par l’envoûtant « Love Sensation ». Moment de grâce dans la salle. Le public en redemande…
La foule a beau pousser, cela n’arrivera pas. On se dirige alors vers la boite de nuit réquisitionnée jusqu’à 7h pour l’Astroclub… boite de nuit où l’on retrouve des podiums et bars de pôle dance sur fond de House et de Techno : un mariage qui nous enchante. L’Astroclub donne libre court à l’imagination de 5 artistes issus de 5 labels français, une manière de faire la part belle au renouveau de la scène française. Une noble manière de clôturer cette seconde soirée. Les musiques puisent dans une multitude de styles, puis tandis que les minutes défilent les DJs nous glissent en guise d’adieu le célèbre « Keep the Fire Burning ».

Même si une certaine amertume persiste, liée au fait ne pas festoyer dans l’impressionnant Manoir de Keroual, les surprises et l’ambiance généreuses de cette édition d’hiver nous ont amplement satisfaits.
Astropolis assume son rôle de meneur de troupe avec sa programmation riche et excitante. Cette édition fut aussi une manière de prendre la température d’une ville telle que Brest, en terme de vie culturelle et festive… et d’en être agréablement surpris.