Le paysage électronique bordelais est en pleine expansion. Porté par de nombreux collectifs, il se diversifie et s’intensifie d’année en année. Nous en faisions un portrait dans un article dernièrement. Il manquait cependant un petit quelque chose, un de ces élément qui fait que Bordeaux ne pouvait pas (encore) se vanter d’être en concurrence avec les plus grandes scènes électroniques françaises comme Lyon ou Paris : une webradio dédié a la musique électronique. Lyon a LYL Radio, Paris a Rinse France, Bordeaux aura Ola Radio.

Nous avons rencontré dernièrement l’équipe à l’initiative de ce projet, Alice, Tommy et Rémi, pour discuter plus en détail du projet.

Salut l’équipe Ola Radio ! On va commencer simplement : est-ce que chacun d’entre vous peut se présenter et expliquer son parcours ?

Je m’appelle Alice, j’ai été 4 ans bénévole à radio Campus Bordeaux dont 1 an en service civique. Avec Tommy, on a eu une émission qui s’appelle Vidéo Anniversaire, qui donnait la parole aux acteurs de la vie nocturne bordelaise, et c’est comme ça que j’ai rencontré Rémi. J’ai aussi bossé pour le magazine Gonzai suite a mes études de design.

Du coup moi c’est Rémi Rasquin. Je reviens d’un voyage et à mon retour, le paysage musical avait bien changé. J’ai eu envie de rencontrer tous les nouveaux acteurs et j’ai donc créé les colocs. Je suis aussi le cofondateur du collectif local Microkosm, crée en 2014, qui est une association organisant des événements électroniques. 

Moi c’est Tommy, j’ai aussi, comme Rémi, cofondé il y a 4 ans une association qui s’appelle À l’eau, pour organiser des événements, inviter des artistes qu’on avait envie d’écouter. J’ai, pendant un an, géré avec Alice l’émission Vidéo Anniversaire et on s’était arrêté avec Alice en se disant qu’on continuerait le projet d’une manière ou d’une autre. Il y a 8 mois, Alice m’appelle un soir et me dit qu’elle est avec Rémi, que je connaissais de vue, étant dans le même secteur. Elle me dit qu’avec Rémi, ils vont créer une webradio et me demandent si je suis partant. C’est ainsi que le projet Ola Radio est né. Et donc on a monté une petite équipe autour de nous, Maceo, Maylis, Adrien, Margot et Clément, qui sont à fond dans le projet.

On voit bien que c’est un projet de potes, comment chacun a-t-il trouvé sa place ?

Rémi : On se cherche encore un peu. On apprend à tous bien travailler ensemble .

Tommy : Chacun est en train de la trouver, les choses se mettent en place tranquillement, on est tous bienveillant les uns les autres, il y a une bonne énergie et c’est ce qui fait la richesse de ce projet.

De quel constat êtes-vous partis pour créer cette webradio ?

Tommy : En fait, on s’est rendu compte qu’il n’y a pas forcément de radio à Bordeaux pour porter l’écosystème dans lequel on évolue. C’est le gros point noir, le gros trou qu’il y a à l’heure actuelle. Preuve en est, c’est pour cette raison que nous avons beaucoup de gens qui nous suivent sur ce projet, y compris des artistes et des salles de concert. Il y a d’excellents médias sur Bordeaux, vous en êtes la preuve, mais il manquait cette partie média radio pour compléter, avec une antenne dédiée à la musique électronique 24/24h.

Alice : Et puis par exemple il y a une salle de concert avec laquelle on va travailler qui disait qu’une fois que les artistes étaient passés chez eux il n’y avait plus trop de trace de leur passage. Si on peut avoir du podcast ou ce genre de chose, c’est toujours du bonus pour tout le monde.

Tommy : Par contre on n’est pas du tout dans l’optique de prendre ce marché-là juste pour nous. C’est-à-dire qu’aujourd’hui on veut faire de ce média une forme d’expression pour un maximum d’acteur qui ressemblent à la couleur, et à la vibe qu’on veut diffuser. On veut porter aussi cela et laisser un maximum l’expression aux parties prenantes qui œuvrent tous les jours pour la culture électronique locale.

Alors justement, puisque tu en parles, qui sont ces parties prenantes ? Quel spectre musical souhaitez-vous explorer ?

Rémi : On a voulu être large sur les différents styles de musique qu’on met en avant.

Alice : On part des musiques électroniques comme base. Après, on ne va pas évidemment que s’arrêter sur les musiques électroniques.

Tommy : On reste dans la musique de niche, qu’elle qu’elle soit. On veut axer notre programmation sur la découverte. Tous les collectifs qui vont participer à la création de contenu sur la radio sont là-dedans, on reste sur le même parti pris.

Donc il y aura une partie programmation musicale pure et qui sera assumé par Ola Radio et à côté de ça, une grille de programmation avec des émissions bénévoles ?

Rémi : Oui !

Tommy : Complètement, c’est ça. Et là dessus, c’est liberté à 100 % pour les émissions des collectifs et des artistes. Ce sont des créneaux de 2 heures en général. Ils peuvent donc inviter un guest et faire 1 h de talk-show et une heure de DJ set, ou bien une heure d’interview, c’est complètement libre. Nous, on est derrière en support technique. La structure est vraiment mise à la disposition des associations.

Rémi : Ils bénéficieront de notre matériel, de notre studio. Au-delà de ça, il y a un volonté très forte de la radio de créer un lien social entre les associations locales, leur permettre de se rencontrer. Ce mouvement est en effervescence depuis quelques mois avec notamment la création de la FIMEB et des colocs.

Vous pensez que c’est important de fédérer les associations entre elles ?

Rémi : On pèse beaucoup plus quand on est rassemblé, aux yeux du public, des auditeurs. Cela permet de donner une dynamique à notre scène. Je pense que cela éduque, sensibilise le public bordelais qui est encore à une phase très balbutiante par rapport a d’autres villes. On doit être fédérateur et c’est pour cela qu’il faut se fédérer. Rires

Comment le public et les gens du milieu ont-ils réagi en apprenant la création de ce projet ?

Rémi : Il y a eu un bel engouement, notamment sur les réseaux sociaux.

Alice : On a eu de très bons retours sur notre identité visuelle qui est très marquée, on a pas voulu laisser de côté cet aspect-là de la radio. Une radio ça s’écoute, mais ça se voit aussi. Si on a choisi Maceo (le graphiste), c’est aussi pour son identité.

Lui aussi, il a carte blanche ?

Rémi : Pour son école (EnsAD – Paris) ou pour lui, il va construire son identité graphique autour d’Ola radio. Notre univers graphique va donc évoluer en fonction de son univers à lui.

La radio est donc pluridisciplinaire ? Vous allez vous limiter à ces deux pôles (musique-art visuel) ou un pôle événementiel est envisageable ?

Rémi : On a plein d’idées mais il est peu tôt pour en parler.

Tommy : Quoi qu’il en soit, on poussera tous nos délires au maximum de ce que l’on pourra.

Alice: Pour le moment, on se concentre d’abord sur la radio. Une chose après l’autre.

Rémi : On peut pas te lâcher d’infos de ouf… Rires

C’est ce que je veux !

Rires 

Rémi : On en a parlé un petit peu entre nous, on verra.

Tommy : Allez… si… on peut lâcher un petit truc. Au moment des événements, on pourra proposer certains types de prestation, comme par exemple d’autres types de reports, des interviews, etc. Il y a tellement de choses à imaginer, on est dessus. L’idée est, dans un premier temps, de demander aux acteurs de venir s’exprimer a notre antenne, puis d’ouvrir à d’autres propositions. Il faut aussi que notre équipe grossisse, que chacun trouve sa place avant d’aller plus loin. 

Rémi : On est fermé à rien, et d’ailleurs on en profite pour dire qu’on recrute, si des gens sont chauds n’hésitez pas à nous contacter.

Tommy : Si demain on nous propose quelque chose de censé et qui correspond à notre radio on est totalement à l’écoute de nouvelles idées, on est vraiment ouvert. 

Alice, tout à l’heure tu nous parlais d’un partenariat avec une salle de concert locale, vos échanges avec les collectifs se passent bien ?

Alice: Carrément, tout le monde est hyper motivé du fait qu’il y ait une sorte d’attente autour de la radio.

Rémi: Et du coup c’est hyper motivant pour nous de voir l’engouement autour du projet.

Il y a LYL à Lyon et Rinse à Paris, il y a une place pour Ola Radio dans le paysage musical français ?

Tommy : C’est ce qu’on s’est dit.

Rémi : Pour le Sud-Ouest en tous cas oui. On veut vraiment pousser Ola à fond pour devenir une référence.

Tommy : Au-delà de ça, on veut vraiment prouver que Bordeaux est une place forte de la musique électronique en France. Le fait d’être une webradio et donc d’émettre sur l’internet aide aussi à ça.

Rémi : Ça permettra de développer la scène locale en dehors de Bordeaux.

Alors justement, comment avez-vous avez choisi les résidents de votre radio ?

Rémi : D‘abord, il y avait des acteurs qui nous semblait évidents et indiscutables d’inviter, comme Electrocorp. On a aussi choisi des DJs et artistes, au nombre de 8, qui ne sont affiliés à aucun collectif. On a privilégié ceux qui ont des sorties sur des labels, qui ne sont pas simplement DJs, mais aussi producteurs de musique. 

Tommy : Ça s’est fait assez naturellement, au vu du regard qu’on avait déjà de l’intérieur avec Rémi chez Microkosm, Alice avec Vidéo Anniversaire et moi chez À l’eau. On avait une vision assez globale. On a souhaité se concentrer sur 20 acteurs locaux, ce qui est déjà beaucoup, histoire de faire bien le travail et d’être à 100 % avec ces 20 là. Et après, dans une deuxième partie de programmation, on verra pour en intégrer d’autre. Les choses vont se faire tranquillement parce qu’on aimerait déjà intégrer une partie live à la programmation assez rapidement.

Rémi: Sachant que les collectifs vont pouvoir inviter des guest, il n’y aura pas forcément que des DJs et artistes de Bordeaux sur les ondes de Ola. On compte sur nos résidents pour développer ça, et aller là où nous, nous n’avons pas pas pu aller pour le moment.

Au niveau de la grille de programmation, ça se passe comment ?

Rémi : La grille alterne entre programmation musicale, résidences d’artistes et de collectifs, émissions culturelles, agenda culturel etc. Il y aura aussi des émissions gérées par la rédaction, par exemple avec celle d’Alice le lundi en fin d’après-midi.

Alice : L‘émission s’appelle « Sous les projecteurs » et elle met en avant des associations et structures bordelaises culturelles non-électroniques.

On en revient au fait que votre spectre musical ne se limitera pas uniquement à la musique électronique. 

Alice: Exactement, c’est une volonté forte de la radio.

Rémi : On veut lier cette musique-là à tout, avec tout ce qui nous entoure dans le monde. Montrer que ce n’est pas un mouvement qui ne concerne que peu de monde, mais bien une musique majeure de l’histoire.

Cela rejoint notre discussion juste avant l’interview, sur le fait que les genres House et Techno descendent de la black music, de la Disco et de la Funk notamment.

Rémi : Exactement ! Personnellement, s’il y a bien un truc qui me gêne, c’est ce clivage entre House et Techno. Avec la radio, ce clivage n’existe pas. C’est ce qui me donne envie de faire de la radio, avec le mélange et l’éclectisme qu’il y aura dans nos émissions et dans notre programmation. On peut vraiment tout faire.

Tommy : Bien entendu sans être brouillon et en restant dans une musique de niche.

Alice : On ne va pas s’ouvrir a tout non plus, c’est sûr.

Tommy : Je pense qu’on a une esthétique en commun – et on ne se jette pas de fleurs en disant ça – avec vous (Electrocorp), avec tous ces acteurs qu’on a choisi.

Rémi : C‘est là que le recrutement à été fait, on a tous plus ou moins la même vision sur la musique malgré le fait qu’aucun collectif ne fasse exactement la même chose.

Et bien merci beaucoup Ola Radio pour l’accueil et votre disponibilité. On rappelle que la radio diffuse déjà depuis la semaine dernière sur votre site internet : https://olaradio.fr